Décryptage n° 1 : Loi « Climat et résilience » et police administrative spéciale de la publicité extérieure

La police administrative spéciale de la publicité extérieure a pour objectif d’encadrer l’implantation à l’extérieur des enseignes, pré enseignes et de toute inscription, forme ou image destinée à informer le public ou à attirer son attention. 

Le changement opéré en la matière n’est pas sans importance dès lors que le nouvel article L. 581-3-1 du code de l’environnement, qui entrera en vigueur au 1er janvier 2024, dévolue les pouvoirs de police administrative spéciale de la publicité extérieure aux maires et non plus aux préfets. 

Toutefois, l’article L5211-9-2 du code général des collectivités territoriales, dont la rédaction entrera en vigueur au 1er janvier 2024, prévoit un transfert obligatoire de cette compétence au profit des présidents des établissements publics de coopération intercommunale (EPCI) à fiscalité propre :

  • Si l’EPCI dispose d’un Plan local d’urbanisme intercommunal (PLUi) ou d’un règlement local de publicité intercommunal (RLPi) ;
  • Si la commune comporte moins de 3.500 habitants, nonobstant l’absence de PLUi ou de RLPi.

 

Les maires auront la possibilité de s’opposer au transfert dans un délai de 6 mois suivant le transfert de compétence et les présidents d’EPCI pourront renoncer, à l’issue de ce délai, audit transfert. 

 

illustration

La loi « Climat et résilience » renforce enfin les pouvoirs de police administrative spéciale de la publicité extérieure en autorisant à réglementer les publicités et enseignes lumineuses situées à l’intérieure des vitrines ou baies d'un local à usage commercial qui n'est pas principalement utilisé comme un support de publicité et destinées à être visibles d'une voie ouverte à la circulation publique.

  

Décryptage n° 2 : Loi « Climat et résilience » et autorisations d’urbanisme

1. La loi prévoit l’abrogation de l’article L111-18-1 du code de l’urbanisme au 1er juillet 2023 en faveur de la création d’un nouvel article L171-4 au sein du code de la construction et de l’habitation. 

Concrètement, il s’agira d’étendre le dispositif existant qui imposait pour certaines constructions d’intégrer des procédés de production d’énergies renouvelables ou de végétalisation des toitures. 

Le futur article L171-4 du CCH imposera cette obligation aux :

  • Nouvelles constructions soumises à une autorisation d'exploitation commerciale, nouvelles constructions de locaux à usage industriel ou artisanal, d'entrepôts, de hangars non ouverts au public faisant l'objet d'une exploitation commerciale, nouveaux parcs de stationnement couverts accessibles au public de plus de 500 m2 d'emprise au sol (et non plus 1.000 m²) ; 
  • Nouveaux bâtiments, ou parties de bâtiments, à usage de bureaux d'une emprise au sol supérieure à 1 000 m2 (alors que ce type d’usage n’était pas visé antérieurement) ; 
  • Extensions et rénovations lourdes de bâtiments ou parties de bâtiments sont aussi concernées en cas de création d'emprise au sol de plus de 500 m2 ou de 1 000 m2 suivant la nature du projet (Un décret devra alors précisera la nature des travaux de rénovation lourde concernés).

Une exonération sera toutefois prévue, par décision motivée de l’autorité compétente en matière de délivrance de l’autorisation d’urbanisme, en raison soit de contraintes techniques, de sécurité, architecturales ou patrimoniales, soit d'une impossibilité d'y parvenir dans des conditions économiquement acceptables.  

 

2. La loi « Climat et résilience » prévoit une nouvelle dérogation possible aux règles définies par les PLUi/PLU et POS 

         Il est créé un article L152-5-1 du code de l’urbanisme qui permet à l’autorité compétente pour délivrer les autorisations d’urbanisme, par décision motivée, de déroger aux règles relatives à la hauteur et à l’aspect extérieur des constructions dans le but d’autoriser « l'installation de dispositifs de végétalisation des façades et des toitures ». 

Cette dérogation ne sera toutefois envisageable, selon la lettre du texte, qu’en zones U et AU.

Il est aussi créé un article L152-5-2 du même code qui permet de déroger aux règles relatives à la hauteur des constructions en faveur des constructions « faisant preuve d’exemplarité environnementale ».

 

Ces dispositions, pour le moment peu compréhensibles, feront l’objet d’un décret pris en Conseil d’Etat afin d’y apporter des définitions et précisions.

La loi prévoit aussi l’extension du dispositif de dérogation en matière de création de places de parking

Pour rappel, en application l’article L152-6 du code de l’urbanisme, il est possible de déroger aux règles des PLUi/PLU et POS en matière de gabarit, de densité, de création de places de stationnement et de respect des distances par rapport aux limites séparatives lorsque la construction poursuit un objectif de mixité sociale. 

Il est aussi possible de déroger aux règles de création de places de stationnement en cas de  transformation d’un immeuble existant à usage principal d’habitation ou lorsque le projet est situé à moins de 500 mètres d'une gare ou d'une station de transport public guidé ou de transport collectif en site propre. 

Ce dispositif s’appliquait aux communes appartenant à une zone d'urbanisation continue de plus de 50 000 habitants et dans les communes de plus de 15 000 habitants en forte croissance démographique (au sens de l’article L302-5 du code de la construction et de l’habitation). 

Désormais, ce dispositif est étendu aux parties de communes comprises dans le périmètre d'une grande opération d'urbanisme (GOU, au sens de l’article L312-3 du code de la construction et de l’habitation) et dans les secteurs d'intervention comprenant un centre-ville des opérations de revitalisation de territoire (au sens de l’article L303-2 du code de la construction et de l’habitation).

 

         Le dispositif prévoit une nouvelle dérogation en matière de gabarit des constructions de l’ordre de 15 %, qui pourra se cumuler avec les dérogations prévues par le même article, sans pouvoir toutefois excéder 50% de dépassement total, lorsque la réalisation du projet présente « un intérêt public du point de vue de la qualité ainsi que de l'innovation ou de la création architecturales ».

 

3. La loi « Climat et résilience » prévoit un nouveau dispositif afin d’encourager à la réhabilitation des friches 

🔍 La notion de « friche » bénéficie désormais d’une définition légale au nouvel article L111-26 du code de l’urbanisme. 

Est une friche « tout bien ou droit immobilier, bâti ou non bâti, inutilisé et dont l'état, la configuration ou l'occupation totale ou partielle ne permet pas un réemploi sans un aménagement ou des travaux préalables. » 

La loi prévoit, afin d’encourager à la réhabilitation des friches, des possibilités de dérogations aux règles des PLUi/PLU s’agissant du gabarit des constructions (dans une limite de 30 %) et s’agissant des obligations en matière de stationnement. 

Dans la même optique, a été créé un certificat de projet présentant les mêmes effets juridiques que le certificat d’urbanisme classique

Ce certificat de projet pourra, en plus de cristalliser les règles relatives aux autorisations d’urbanisme applicables, intégrer les règles relatives aux autorisations du code de l'environnement, du code de la construction et de l'habitation, du code rural et de la pêche maritime, du code forestier, du code du patrimoine, du code de commerce et du code minier. 

 

4. La loi « Climat et résilience » prévoit l’interdiction de toute nouvelle surface commerciale artificialisante. 

L’article L752-6 du code de commerce, s’agissant des autorisations d’exploitation commerciale devant être obtenues avant toute création d’une surface commerciale, dispose désormais qu’elles ne pourront pas être délivrées si le projet consiste en l’implantation ou en l’extension d’une surface commerciale qui engendrerait « une artificialisation des sols ». 

🔍 La notion d’artificialisation des sols est définie par renvoi à l’article L101-2-1 du code de l’urbanisme : « altération durable de tout ou partie des fonctions écologiques d'un sol, en particulier de ses fonctions biologiques, hydriques et climatiques, ainsi que de son potentiel agronomique par son occupation ou son usage. » 

L’article précité prévoit toutefois des exceptions notables, si le porteur de projet démontre, avec une étude d’impact, que son projet s'insère en continuité avec les espaces urbanisés dans un secteur au type d'urbanisation adéquat, qu'il répond aux besoins du territoire et qu'il obéit à l’un des critères suivants (ces critères sont donc alternatifs) :

  • Le projet s’insère dans le secteur d'intervention d'une opération de revitalisation de territoire ou dans un quartier prioritaire de la politique de la ville ;
  • Le projet s’insère dans une opération d'aménagement au sein d'un espace déjà urbanisé, afin de favoriser notamment la mixité fonctionnelle du secteur concerné ;
  • Le projet compense par la transformation d'un sol artificialisé en sol non artificialisé ;
  • Le projet s’insère dans un secteur d'implantation périphérique ou d'une centralité urbaine identifiés dans le document d'orientation et d'objectifs d’un SCoT ou au dans zone d'activité commerciale délimitée dans le règlement d’un PLUi.

 

Cette exception n’est applicable que pour des projets précisément identifiés par le texte :

  • La création d'un magasin de commerce de détail ou d'un ensemble commercial d'une surface de vente inférieure à 10.000 m² ;
  • L'extension de la surface de vente d'un magasin de commerce de détail ou d'un ensemble commercial dès lors que la surface de vente totale dudit magasin ou ensemble commercial reste inférieure à 10.000 m² ;
  • L'extension de la surface de vente d'un magasin de commerce de détail ou d'un ensemble commercial ayant déjà atteint le seuil des 10.000 m² ou devant le dépasser par la réalisation du projet, dans la limite d'une seule extension par magasin ou ensemble commercial et sous réserve que l'extension de la surface de vente soit inférieure à 1.000 m². 

S’agissant enfin de la création d'une surface de vente supérieure à 3.000 m² et inférieure à 10.000 m², la dérogation ne sera accordée qu'après avis conforme du Préfet.

 

5. La loi « Climat et résilience » prend en compte le risque d’érosion afin d’améliorer la gestion des nouvelles constructions dans les zones touchées par le recul du trait de côte. 

La loi créé un nouvel article L121-22-2 du code de l’urbanisme afin de permettre aux communes confrontées au risque d’érosion côtière la mise en place d’une politique de gestion du trait de côte par l’identification de deux types de zones :

  • Une zone exposée au recul du trait de côte à l’horizon de 30 ans ;
  • Une zone exposée au recul du trait de côte à un horizon compris entre 30 et 100 ans.

 

Le rapport de présentation du document d’urbanisme devra alors comprendre une synthèse des études techniques prises en compte pour délimiter ces zones dans le document graphique du règlement et comprendre une synthèse des actions de lutte contre l'érosion côtière et des actions issues des stratégies locales de gestion intégrée du trait de côte. 

La délimitation de ces zones emportera des conséquences sur les constructions qui pourront y être autorisées, en application du nouvel article L121-22-4 du code de l’urbanisme. 

Ainsi, s’agissant des espaces urbanisés au sein d’une zone exposée au recul du trait de côte à l’horizon de 30 ans, seules peuvent être autorisés, sous réserve toutefois de ne pas augmenter la capacité d’habitation des constructions : 

  • Les travaux de réfection et d'adaptation des constructions existantes à la date d'entrée en vigueur du plan local d'urbanisme délimitant la zone ;
  • Les constructions ou installations nouvelles nécessaires à des services publics ou à des activités économiques exigeant la proximité immédiate de l'eau, à condition qu'elles présentent un caractère démontable ;
  • Les extensions des constructions existantes à la date d'entrée en vigueur du plan local d'urbanisme délimitant la zone, à condition qu'elles présentent un caractère démontable. 

Dans les espaces non urbanisés au sein d’une zone exposée au recul du trait de côte à l’horizon de 30 ans, seules pourront y être autorisées les constructions ou installations nécessaires à des services publics ou à des activités économiques exigeant la proximité immédiate de l'eau, à condition toutefois qu’elles présentent un caractère démontable. 

S’agissant d’une zone exposée au recul du trait de côte à un horizon compris entre 30 et 100 ans, le nouvel article L121-22-5 du code de l’urbanisme impose la démolition de toute construction nouvelle et des extensions des constructions existantes à compter de la date d’entrée en vigueur du plan local d'urbanisme délimitant la zone, dans le cas de figure où « le recul du trait de côte est tel que la sécurité des personnes ne pourra plus être assurée au-delà d'une durée de trois ans ». 

Cette obligation de démolition s’accompagnera d’une remise en état du terrain, sous la responsabilité et aux frais du propriétaire. 

Le nouvel article L121-22-5 du code de l’urbanisme attribue un pouvoir de police au maire qui sera compétent pour ordonner la démolition. 

Dans l’hypothèse où le propriétaire n’aurait pas déféré à la mise en demeure de démolir et de remettre le site en état, le maire pourra faire procéder d’office à tous les travaux nécessaires en lieu et place de propriétaire et aux frais de celui-ci. 

En plus de cette sanction administrative, l’article L480-4 du code de l’urbanisme prévoit désormais une peine d’amende comprise entre 1.200€ et 6.000€ par mètre carré de surface de plancher en infraction, en cas d’inexécution, dans les délais prescrit par la mise en demeure, des travaux de démolition et de remise en état. 

Enfin, la délivrance de toute autorisation d’urbanisme au sein d’une zone exposée au recul du trait de côte à un horizon compris entre 30 et 100 ans devra faire l’objet d’une consignation entre les mains de la Caisse des dépôts et consignations d’une somme correspondant au coût prévisionnel de la démolition et de la remise en état. 

 

6. La loi « Climat et résilience » modifie le dispositif pénal du code de l’urbanisme 

La loi « Climat et résilience » modifie l’article L480-5 du code de l’urbanisme qui permet au juge pénal, en cas de condamnation pour une infraction d’exécution de travaux sans autorisation ou en méconnaissance de l’autorisation obtenue, ou en méconnaissance des prescriptions du PLUi/PLU, d’ordonner la mise en conformité des constructions ou leur démolition. 

Désormais, il sera possible au juge pénal d’ordonner ces mesures dans le cadre d’une ordonnance pénale ou dans le cadre d’une procédure de comparution immédiate sur reconnaissance préalable de culpabilité (CRPC). 

 

Décryptage n° 3 : Loi « Climat et résilience » et l’objectif de « zéro artificialisation nette » (ZAN) : 

La tendance des dernières années était clairement en faveur de la limitation de l’artificialisation des sols au profit de la préservation des espaces naturels et agricoles. 

La loi « Climat et résilience » définit l’artificialisation des sols à l’article L101-2-1 du code de l’urbanisme comme « l'altération durable de tout ou partie des fonctions écologiques d'un sol, en particulier de ses fonctions biologiques, hydriques et climatiques, ainsi que de son potentiel agronomique par son occupation ou son usage », et inscrit un objectif de ZAN au sein des documents d’urbanisme. 

La nouvelle rédaction des articles L141-3 et L141-10 du code de l’urbanisme impose désormais aux SCoT de fixer, par tranches de 10 années, un objectif de réduction du rythme de l'artificialisation et leur permet d’identifier des zones préférentielles pour la renaturation, par la transformation de sols artificialisés en sols non artificialisés. 

Le législateur semble ainsi créer un nouveau zonage « zone de renaturation préférentielle » aux fins de mener des actions ou des opérations de restauration ou d'amélioration de la fonctionnalité d'un sol, ayant pour effet de transformer un sol artificialisé en un sol non artificialisé. 

illustration

La nouvelle rédaction de l’article L151-5 du code de l’urbanisme impose au PADD des PLUi/PLU de fixer des objectifs chiffrés de modération de la consommation de l’espace et de lutte contre l’étalement urbain. 

En complément, le PADD ne peut plus prévoir l'ouverture à l'urbanisation d'espaces naturels, agricoles ou forestiers. Sauf s’il justifie au moyen d'une étude de densification des zones déjà urbanisées, que la capacité d'aménager et de construire est déjà mobilisée dans les espaces urbanisés. 

Les PLUi/PLU devront désormais tenir compte de la capacité à mobiliser effectivement les locaux vacants, les friches et les espaces déjà urbanisés pendant la durée comprise entre l'élaboration, la révision ou la modification du PLU et l'analyse des résultats d’application dudit plan au regard notamment de l’objectif de renouvellement urbain, développement urbain et rural maîtrisé, de restructuration des espaces urbanisés, de revitalisation des centres urbains et ruraux et de lutte contre l'étalement urbain. 

Cette analyse devra avoir lieu au plus tard 6 ans après la délibération portant approbation du PLUi/PLU, ou la dernière délibération portant révision complète de ce plan, ou la délibération ayant décidé son maintien en vigueur ou sa modification. 

Tant que la modification ou la révision du PLUi/PLU au regard des résultats de l’analyse précitée n’est pas en vigueur, il sera interdit aux maires de délivrer toute autorisation d'urbanisme dans une zone AU du plan ou dans les secteurs de la carte communale où les constructions sont autorisées.