La relation entre les parties joue un rôle primordial dans la définition des violences conjugales. La victime et l’auteur doivent entretenir une relation sentimentale. Ils peuvent être mariés, pacsés, en concubinage ou entretenir une simple relation amoureuse. Cette relation peut être finie au moment des faits, le couple peut avoir divorcé, rompu le PACS ou s’être séparé.  

Qu’est-ce que c’est, les violences conjugales ?

Le terme « violences conjugales » englobe plusieurs types de violence :

  • Il peut s’agir de violence physique, c’est à dire de coups et blessures,
  • de violence sexuelle, c’est à dire les attouchements sexuels et le viol, même entre époux,
  • de violence morale, incluant le harcèlement moral, les insultes et les menaces,
  • ou de violence économique, qui consiste à maintenir une dépendance économique de la victime envers son conjoint.  

De quelles protections bénéficient les étrangers victimes de violences conjugales en France ?

 

Demande de protection internationale ou subsidiaire ?

Il est tout à fait envisageable, pour un étranger victime de violences conjugales, de déposer une demande d’asile en France.

Afin d’obtenir la protection internationale, l’étranger doit démontrer qu’il risque de subir des persécutions dans son pays d’origine en raison de sa race, sa religion, sa nationalité, ses opinions politiques ou son appartenance à un certain groupe social.

Alors que l’article L 511-3 du CESEDA dispose que « S'agissant des motifs de persécution, les aspects liés au sexe, à l’identité de genre (…) sont pris en considération aux fins de la reconnaissance de l'appartenance à un certain groupe social ou de l'identification d'une caractéristique d'un tel groupe », la Cour Nationale du Droit d’Asile n’a pourtant jamais reconnu l’existence d’un groupe social des personnes victimes de violences conjugales.

Le demandeur d’asile pour raison de violences conjugales n’obtiendra donc pas le statut de réfugié si son récit d’asile relate uniquement ses craintes de subir à nouveau de telles violences.

En revanche, il pourra bénéficier de la protection subsidiaire. La protection subsidiaire permet de reconnaitre une protection à des individus qui n’entrent pas dans le champ de la convention de Genève mais qui sont exposés à des traitements inhumains et dégradants. Cela permet d’inclure les victimes de violences conjugales et familiales.

 

Pour cela la personne devra prouver qu’il « existe des motifs sérieux et avérés de croire qu'elle courrait dans son pays un risque réel » de subir des traitements inhumains et dégradants (art. L. 512-1 du CESEDA).

Pour apprécier la réalité des faits allégués, l’OFPRA et les juges s’appuieront d’abord sur la cohérence du récit du demandeur. Ensuite, tous les éléments qui pourront étayer ces propos devront être ajoutés au dossier : certificat médical, dépôt de plainte, témoignages, attestation d’une structure d’accueil pour les victimes de violences conjugales…

Ensuite, pour obtenir la protection subsidiaire, il faut démontrer que le pays d’origine de la victime n’est pas en mesure de la protéger. Par exemple, cela peut venir du fait que les violences conjugales ne soient pas criminalisées dans l’Etat de nationalité du demandeur, ou qu’en pratique, les autorités dudit Etat n’interviennent pas dans ce genre de situation.

Si la situation de violences conjugales subie par le demandeur parait réelle et que le défaut de protection étatique est prouvé, l’OFPRA, ou la CNDA, lui feront bénéficier de la protection subsidiaire, et il recevra à ce titre une carte de séjour temporaire.

Le titulaire d’un titre de séjour

-          L’étranger placé sous ordonnance de protection :

Lorsque les violences exercées au sein du couple ou par un ancien conjoint, un ancien partenaire lié par un pacte civil de solidarité ou un ancien concubin mettent en danger la personne qui en est victime, ou un ou plusieurs enfants, le juge aux affaires familiales peut délivrer en urgence à cette dernière une ordonnance de protection.

Dans cette hypothèse, la préfecture perd sa marge d’appréciation. Elle est tenue de délivrer à la  victime une carte de séjour temporaire mention « vie privée et familiale », d’une durée d’un an, sans que soit nécessaire d’apporter la preuve de la communauté de vie. La carte sera renouvelée de plein droit si à son expiration, l’étranger continue de bénéficier d’une ordonnance de protection.

Si la victime porte plainte, sa carte de séjour sera renouvelée pendant toute la durée de la procédure pénale (article L. 425-6 CESEDA). Si cette procédure découle sur la condamnation définitive du conjoint, la victime pourra alors bénéficier d’une carte de résident d'une durée de dix ans, sans que la rupture de la vie commune ne puisse lui être opposée (article L. 425-8 CESEDA).

-          L’étranger conjoint de français :

Pour obtenir une carte de séjour mention « vie privée et familiale » en tant que conjoint de français, il faut remplir plusieurs conditions (article L. 423-1 CESEDA) :

  • Ne pas vivre en état de polygamie,
  • Que le conjoint ait conservé sa nationalité française,
  • Que la vie commune du couple n’ait pas cessé depuis le mariage,
  • Si le mariage a été célébré à l’étranger, il faut qu’il ait été transcrit sur les registres civils français

En principe, dans le cas où la vie commune est rompue dans les quatre années suivant la célébration du mariage, la carte de séjour peut être retirée au conjoint étranger. Toutefois, si la vie commune a cessé en raison de violences conjugales ou familiales, la préfecture ne peut pas décider du retrait du titre (article L.423-6 CESEDA). (Au-delà de quatre ans, si la victime est bénéficiaire d’une carte de résident, celle-ci ne pourra pas faire l’objet d’un retrait même en cas de rupture de la vie commune.)

Il en va de même lorsque le conjoint étranger d’un ressortissant français a rompu la vie commune à cause de violences avant d’avoir obtenu son premier titre de séjour. Dans ce cas, si les autres conditions sont remplies, alors la carte de séjour lui sera délivrée. (art. L. 423-5 CESEDA).

-          Le bénéficiaire du regroupement familial :

Le droit au regroupement familiale peut être remis en cause en cas de rupture de la vie commune dans les trois années qui suivent l’arrivée en France du conjoint étranger.

Cette condition n’a plus lieu d’être lorsque la vie commune est rompue en raison de violences conjugales.

Si les violences se sont produites avant la première délivrance du titre de séjour du conjoint bénéficiaire, cela ne l’empêchera pas de recevoir son titre de séjour.  La préfecture lui délivrera une carte de séjour « vie privée et familiale » d’une durée d’un an.

Si la victime est déjà titulaire d’un titre de séjour au moment de la rupture de la vie commune, on ne peut pas lui retirer sa carte pour cette raison. L’étranger a le droit au maintien du séjour régulier (art. L. 423-18 CESEDA).

-          Le conjoint ou partenaire d’un réfugié :

Le conjoint de l'étranger reconnu réfugié, ou son partenaire avec lequel il est lié par une union civile peut obtenir de plein droit une carte de résident de dix ans. Pour cela, il doit avoir été autorisé à séjourner en France au titre de la réunification familiale.

Dans le cas où le mariage a été célébré après la demande d’asile du conjoint ayant le statut de réfugié, l’étranger peut bénéficier de cette carte s’il répond aux conditions suivantes :

  • Avoir au moins 18 ans ;
  • Le mariage a été célébré depuis au moins un an au jour de la demande de la carte de résident ;
  • Et que la communauté de vie des époux n’ait pas cessé.

La situation administrative du conjoint étranger n’est pas prise en compte. (art. L. 424-3 CESEDA).

 

Une fois obtenue, la carte de résident de dix ans peut être retirée si la vie commune est rompue.

Le cas de rupture de la vie commune en raison de violences conjugales constitue l’exception à cette règle : dans ce cas, le conjoint conservera son titre de séjour (art. L 424-7 CESEDA).

 

-          Le conjoint d’un bénéficiaire de la protection subsidiaire

Le conjoint d’un bénéficiaire de la protection subsidiaire peut obtenir une carte de séjour mention vie privée et familiale valable 4 ans, dans les même conditions que pour le conjoint d’un réfugié (art. L. 424-11 CESEDA). Ce titre de séjour ne peut pas lui être retiré en cas de rupture de la vie commune à cause de violences conjugales (art. L. 424-16 CESEDA).

 

Victimes de violences conjugales : sortez du silence !

Que vous soyez une femme ou un homme, quel que soit votre nationalité et votre situation administrative sur le territoire français, vous êtes avant tout une victime. A ce titre, vous bénéficiez de tous les services disponibles en cas de violences conjugales.

Vous pouvez contacter le 3919, pour être écouté et connaitre la marche à suivre pour sortir de votre situation. En cas d’urgence, il faut appeler la Police ou la Gendarmerie, au 17 ou au 112. Les appels sont gratuits dans les deux cas.